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Léopold Coppieters, 30 Under 30 : « On n’est rien sans son équipe »

Léopold Coppieters a reçu son prix de Forbes 30 under 30 il y a près d’un an, alors qu’il avait 29 ans. Trentenaire depuis le mois de mars dernier, il est la tête d’une équipe d’une trentaine de personnes désormais. Son entreprise, Skysun, mise sur l’économie environnementale puisqu’elle agit en tant que développeur, installateur (EPC) et gestionnaire (IPP) d’actifs solaires photovoltaïques. L’idée est d’installer gratuitement des panneaux photovoltaïques sur la toiture, parking ou terrain d’une entreprise, sans aucun investissement de sa part. Celle-ci peut alors profiter d’une électricité verte à prix fixe ultra-compétitif, réduire immédiatement ses factures d’énergie et augmenter la valeur de son bien immobilier. Retour avec le co-fondateur et « Chief Solar Officer » de la start-up, qui avait levé 16,8 millions d’euros il y a quelques mois pour accélérer son expansion, notamment en France, sur la genèse de ce projet.
Forbes.be – Léopold, qu’est-ce qui vous a amené à vous lancer dans cette aventure entrepreneuriale? 
Léopold Coppieters – J’ai lancé Skysun avec Arthur Dawans, co-fondateur, en 2018. A l’époque, j’étais dans mes études de marketing à l’Ephec, que je suivais pour dire de faire des études universitaires. Mais, à côté de ça, ma passion à l’époque, et encore aujourd’hui d’ailleurs, c’était la charpenterie. Durant mon bac, j’avais donc lancé ma petite entreprise de charpenterie et je faisais des cabanes de jardin. Dans le même temps, je me retrouve à faire deux blocus avec Arthur, qui lui étudiait la finance. On a discuté de se lancer dans l’entreprenariat, car ça nous intéressait tous les deux, nos papas étant eux-mêmes entrepreneurs. A la fin de mon bac, j’ai fait un stage dans une start-up gantoise active dans l’hydroélectricité, ce qui nous a permis de découvrir le secteur des énergies renouvelables. Nous avons voulu reproduire le modèle en Wallonie mais cela s’est avéré compliqué. Cela nous a cependant permis de découvrir ce qu’était un certificat vert et le modèle de financement des projets d’énergies renouvelables. Et on s’est rendu compte qu’à Bruxelles, il y avait de gros taux de subsides et des prix des matières premières qui descendaient fort. On s’y est donc lancé avec les panneaux solaires.
– Vous vous lancez directement à fond ? 
– Pas exactement, car nous n’étions pas super confiants. On a donc veillé à poursuivre nos études parallèlement: en sciences et gestion de l’environnement pour moi, et en finances pour Arthur, qui a aussi suivi un stage en immobilier. On avait donc un excellent mélange avec l’immobilier, l’énergie, l’environnement et la finance. On finit par effectuer une levée de fonds de 200.000 euros en 2019 et, en même temps, à se payer un petit salaire, au bout, donc, d’un an et demi-deux ans d’aventure.
– Arrive le premier grand projet…
– En 2020, on décroche un contrat pour les Abattoirs d’Anderlecht. Ca avait fait beaucoup de bruit car il s’agit d’un monument classé de plus d’un hectare, qui était un peu dans un état de laisser-aller depuis 40 ans. On a donc rénové la toiture du bâtiment des halles et installé des panneaux photovoltaïques. Cela nous a fait bonne presse. AG Insurance nous a alors proposé d’investir, avec de la dette subordonnée. Cela signifie qu’on finance un projet avec la banque, qui met la part du lion, et un emprunt avec AG, qui complète et se substitue aux fonds propres. Ensemble, ça nous a donné 80 millions d’euros d’investissement. L’activité commence à bien démarrer mais on reste toujours dans une optique très organique car le métier reste très saisonnier. Après avoir développé et vendu des projets, il faut en effet essayer de les installer avant l’été pour qu’ils produisent et qu’on ait de l’énergie à vendre pendant l’été, afin qu’on remplisse les caisses. L’hiver, ce sont plutôt des vaches maigres et on rembourse l’emprunt et on paie les salaires.
– Et les affaires ont continué depuis lors? 
– Oui, on a fait ça quatre années de suite, jusqu’à l’été 2024, lors duquel on effectue une levée de fonds substantielle de 17 millions d’euros pour aller développer à la fois le Benelux et la France. On y avait lancé un peu plus tôt Skysun France, qui était géré par mon frère et son associé parisien et dont Skysun Belgique était en quelque sorte actionnaire. Avec la levée de fonds, on a rassemblé tout le monde et on a racheté Skysun France d’une certaine manière afin d’avoir un seul groupe consolidé et de tous partager la même vue. Parallèlement à ça, nous nous sommes lancés dans une société de construction, Helio Tech.
– Pourquoi avoir fait ce choix ? 
– Pour bien comprendre, il faut revenir sur notre modèle chez Skysun. Notre objectif est de financer la transition énergétique en Europe. Pour cela, nous nous adressons aux PME et aux industriels. On cherche des surfaces pour y construire des projets photovoltaïques. Ça peut être un parking, une toiture, un projet au sol, etc. Une fois qu’on a cette surface, on va développer le projet en décrochant les autorisations et en ficelant le dossier financier… Quand c’est fait, on y va et on investit. Pendant tout un temps, on faisait alors un appel d’offres pour aller chercher deux-trois installateurs et on prenait le plus offrant et on le faisait installer les panneaux. On reste propriétaire des installations, dont on vend l’électricité produite, un peu comme un développeur immobilier qui construirait un immeuble et puis ne le vendrait pas mais louerait l’appartement. Or, en 2022 avec la crise énergétique et la guerre en Ukraine, on s’est retrouvés avec des installateurs qui ne travaillaient plus avec nous parce qu’il y avait une très importante demande résidentielle, qui leur permettait en plus de se gaver méchamment. Nous on leur proposait 15-20% de marge, là où ils pouvaient parfois en obtenir 300% en faisant signer des personnes âgées. Bref, les emails restaient sans réponse et les projets trainaient. On a donc décidé de créer Helio Tech, sorte de filiale. Il fallait tout de même garder une certaine tension, saine, entre l’entrepreneur général et le maître d’ouvrage, c’est-à-dire nous, qui restons propriétaire des installations durant 20 ans. Mais c’est chouette car, finalement, tout notre budget d’investissement devient du chiffre d’affaires pour Helio Tech. Après, on ne fait pas non plus toutes nos installations avec eux car la boîte est encore en phase de croissance et n’est pas capable de toutes les assumer.

– Vous êtes combien chez Skysun et Helio Tech?
 On est une petite trentaine chez Skysun, répartis entre Bruxelles, Paris et Strasbourg, et ils sont trois chez Helio Tech, qui est basée à Wavre et qui va plutôt aller démarcher des sous-traitants mais qui fait également des installations pour des tiers. On va donc avoir une entreprise orientée cash flow dans un métier (celui de Skysun, NDLR) où il y en a assez peu finalement. Et puis on va aussi tenter de développer notre empreinte sur la région Auvergne-Rhône-Alpes, qui en fait est la première région industrielle de France et la seconde région économique derrière Paris. A Lyon, il y a toute l’industrie métallurgique et chimique, avec un bassin industriel sur les bords du Rhône. Et c’est une zone logistique importante entre l’Italie, la Suisse, la France, l’Allemagne, non loin du tunnel du Mont Blanc.

– Quels sont vos principaux clients? 
On a pas mal de sociétés immobilières telles que Befimmo, Cofinimmo, AG Real Estate, Axa. En fait, un peu toutes les assurances et les sociétés immobilières. Et puis on a tout ce qui est retail, avec des Hubo, Basic-Fit, Action,… On retrouve également des PME, la boulangerie Brauns à Anderlecht, sans oublier les Abattoirs évidemment. C’est d’ailleurs ce projet très esthétique qui a attiré le regard du centre sportif David Lloyd d’Uccle, niché dans un beau château historique. Il y a en effet pas mal de propriétaires immobiliers ou d’entreprises qui souhaitent avoir quelque chose comme ça, d’assez discret. Enfin, on peut encore citer les Calcaires de la Sambre, un gros industriel de Montigny-le-Tilleul (Charleroi), où nous avons un projet sur cinq hectares au sol, ou le Marché International Mouscronnois, avec plus d’un hectare de toiture. Bref, un ensemble d’endroits où il y a plutôt de la consommation.
– Venons-en à ce prix Forbes 30 under 30… 
– Eh bien, déjà, le prix trône dans notre armoire aux trophées, à l’entrée de notre bureau bruxellois ! C’est évidemment hyper chouette, surtout que Forbes est une marque forte, tout comme son prix 30 under 30. Ça donne pas mal de crédibilité pour le développement de l’entreprise et, pour celles qui nous ont déjà choisi, elles se disent qu’elles n’ont pas trop mal tapé quand même. Ça aide un peu à tout niveau, que ce soit commercialement pour les clients, pour créer de la crédibilité chez nos investisseurs ou pour le recrutement. J’estime vraiment que ce prix est donné avant tout à Skysun, plus qu’à moi-même. On n’est rien sans son équipe, qui est faite, chez nous, de personnes venues apporter énormément d’expérience et de qualités qui se complètent mutuellement.

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