Lancé par Otium Capital en 2022, Otium Studio incarne un modèle inédit de startup studio intégré, à la fois exigeant et massivement financé. Dirigé par le Belge Quentin Vanbever et le Français Anselme Coulomb, ils ambitionnent de créer jusqu’à 30 startups par an, tout en préparant son implantation aux États-Unis. Décryptage d’une mécanique de venture building calibrée pour la rentabilité rapide et l’hypercroissance.
Un startup studio né au cœur d’un family office ambitieux
Otium Studio est né de la volonté de Pierre-Édouard Stérin, fondateur d’Otium, de passer d’investisseur à bâtisseur. Ce family office, aujourd’hui à la tête de 1,7 milliard d’euros d’actifs, déploie une stratégie hybride alliant capital-risque, consolidation industrielle et création d’entreprises ex nihilo. Ce dernier pilier prend forme avec Otium Studio, lancé fin 2022 pour internaliser la genèse de projets à fort potentiel.
Dans un contexte où 80% des startups françaises restent dépendantes de financements publics, Otium Studio détonne. Il vise à développer une enveloppe de 180 millions d’euros jusqu’en 2030, avec un objectif clair de dix startups lancées chaque année, toutes ciblant 100 millions de gains en capital en cinq à sept ans.
Quentin Vanbever : un profil belge aux commandes du studio
Arrivé à la co-direction du studio en juillet 2025, Quentin Vanbever apporte un vécu opérationnel forgé chez Uber Eats et Glovo. Il revendique une quinzaine de pays couverts en lancement de scale-ups, notamment en Amérique latine et Europe, Moyen-Orient et Afrique.
« J’ai rejoint Otium pour accélérer », confie-t-il. « Mon parcours est plus orienté scale. J’ai travaillé chez Uber, dans des boîtes d’hyperscale, et c’est exactement ce qu’on veut faire ici. »

Son rôle consiste à structurer une mécanique d’exécution industrialisée et à attirer des talents entrepreneuriaux au parcours d’exception. « On veut des gens qui ont eu des carrières très ambitieuses, mais qui ont parfois mis leur projet entrepreneurial en pause pour des raisons personnelles. Avec notre modèle, ils peuvent se lancer sans renoncer à un salaire compétitif ou à leur style de vie. » De son côté, Anselme Coulomb, ex-BCG, prend en charge la stratégie du studio. Le Belge et le Français ont donc chacun leur pré-carré et avancent de concert.
Un modèle intégré et offensif de venture building
Le positionnement d’Otium Studio est radical. Quatre-vingt-dix pour cent des idées sont conçues en interne, avec une sélection draconienne. Marché cible d’au moins un milliard d’euros, rentabilité visée en trois à quatre ans, faible intensité R&D, copycat éprouvé à l’étranger : tout est pensé pour minimiser l’incertitude et maximiser la vitesse d’exécution.
Contrairement à d’autres startup studios qui se contentent de tickets modestes ou de programmes d’accompagnement, Otium prend des parts majoritaires mais offre un package complet incluant un financement long terme, un accompagnement stratégique, juridique, marketing, RH et un réseau international.
« On ne veut faire que des business avec 100 millions de gains en capital. Et pour ça, il faut que le fondateur se concentre sur ce qui crée de la valeur, pas sur la levée de fonds », résume Quentin Vanbever.
Des chiffres solides et un modèle éprouvé
Avec un taux de transformation supérieur à 80% des entrepreneurs en résidence, Otium Studio affiche un track-record que peu de concurrents peuvent revendiquer. Parmi les réussites, Dossier, dans le secteur des parfums de luxe, a réalisé 90 millions de dollars de chiffre d’affaires en 2024. Giftory, marketplace d’expériences, a dépassé les 20 millions de dollars en moins de deux ans. Ensol, dédiée à l’énergie solaire résidentielle, a levé 14 millions d’euros en série A seulement un an après sa création.
Au total, plus de 120 millions d’euros de chiffre d’affaires ont été générés par le portfolio en 2024, avec une diversification sectorielle affirmée et une forte implantation aux États-Unis. Le TRI (Taux de Rentabilité Interne) du groupe Otium dépasse les 25% depuis 2015, confirmant la solidité de l’approche.
Futur champion transatlantique du startup studio ?
L’accélération est désormais enclenchée. En 2025, le studio vise à doubler son rythme de création, avec une startup lancée chaque mois d’ici à 2030. Cette montée en charge repose sur une méthode rigoureuse d’identification d’opportunités, de recrutement entrepreneurial et de déploiement rapide. L’ouverture d’un bureau à New York est prévue pour 2026.
« On va ouvrir un bureau aux US et on cherche des talents francophones. C’est un vrai enjeu d’expansion, mais aussi un vecteur de complexité qu’on assume », explique Quentin Vanbever.
Parmi les projets en cours figurent un réseau de clubs de padel aux États-Unis, une marque de maroquinerie accessible, une plateforme digitalisée de services de nettoyage résidentiel, ou encore la création du futur leader français de la dératisation. Otium Studio cible des marchés souvent négligés, peu digitalisés, mais à fort potentiel de consolidation et de croissance rapide.
Le test industriel du venture building à l’européenne
En à peine trois ans, Otium Studio est passé du statut de satellite d’un family office à celui d’architecte industriel de startups. Son modèle founder-first, sa puissance financière et sa discipline stratégique en font un acteur singulier du paysage entrepreneurial européen.
Mais l’enjeu reste immense : maintenir la qualité tout en multipliant les projets, affronter une concurrence croissante sur le terrain du venture building et convaincre les meilleurs talents de rejoindre l’aventure. Le défi est autant opérationnel que culturel.
S’il réussit, Otium Studio pourrait bien imposer une nouvelle norme pour l’entrepreneuriat en Belgique et en France… et transformer durablement les codes du capital-risque.