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Six (très) beaux livres à offrir à Noël

Six (très beaux) livres à glisser au pied du sapin : trois du Fonds Mercator, éditeur-phare bruxellois, un d’Hannibal Books, jeune maison anversoise, un autre de Cinq Continents, maison milanaise fondée par un Belge, et un livre-hommage édité par Larock-Granoff, galerie parisienne historique.

Films – Rinus van de Velde

L’art représente-t-il fidèlement une réalité supposée possible ? Depuis 200 ans, l’Occident a répondu non, rappelle Timon Karl Kaleyta en ouverture de Films, publié chez Hannibal Books (105 €). L’Anversois Rinus van de Velde traduit ce credo dans la matière même de ses dessins au fusain qui l’ont fait connaître. Il y couche un monde fictif d’identités et d’histoires inventées, où il se mêle — ou son alter ego — à des anonymes et à des célébrités, en un récit intrigant. Le fusain même soulève cette question de l’identité : technique sujette à l’effacement, il possède les qualités du fantôme, aussi sombre qu’un cauchemar, aussi flottant que le nuage de fumée d’une cigarette. Avec ces films, Rinus Van de Velde, né à Louvain en 1983, poursuit son périple mental : ce sont des non-voyages où il fréquente d’autres artistes, passés ou présents. Il en crée les décors, comme les dix-sept cartons grandeur nature de The Villagers, qui lui ont demandé deux ans de travail. Et La Ruta Natural (2019-2021), compose un monde en vase clos, annoncé par son titre, puisque c’est un palindrome. Le livre est accompagné d’un vinyle de ses musiques de films.

© Hannibal Books
© Hannibal Books

www.hannibalbooks.be

Volker Hermes Portraits cachés

L’artiste allemand Volker Hermes a été découvert sur Instagram par le Belge Eric Ghysels, fondateur de 5 Continents Editions à Milan. Hermes a étudié la philosophie puis la peinture à l’Académie des Beaux-Arts de Düsseldorf, école majeure en Europe, revisite l’art du portrait, aux frontières entre identité et masques sociaux. Il réalise des collages photographiques à partir de portraits historiques, cachant délibérément les visages des modèles derrières des masques, des pièces de tissu ou des perruques sophistiquées. Il n’utilise que des éléments déjà présents dans les tableaux originaux, ne procède à aucun ajout, mais se livre à un savant remodelage de ce qui est là. 

Faisant disparaître le personnage derrière le masque, il dissimule l’identité du modèle. Ce faisant, il dérange notre regard contemporain, étranger à ces codes vestimentaires passés, le masque cristallisant la difficulté de saisir l’essence de l’être derrière les apparences et les rôles.

Au-delà de la manipulation esthétique, en déroutant notre vision de ces portraits anciens, Portraits cachés (35 euros) détourne le rapport entre image et identité, avec un humour fou. 

5 Continents Editions
5 Continents Editions

www.fivecontinentseditions.com

Larock-Granoff. Histoire d’une galerie

Ce livre (45 euros) retrace l’histoire de la galerie parisienne Larock-Granoff, sise à un jet de pierre de l’Institut de France. Katia Granoff quitte l’Ukraine (alors dans l’Empire russe), arrive avec sa sœur, Rose Larock, à Paris en 1924, diplômée mais sans un sou, où elles fondent aussitôt leur galerie. La rencontre avec Marc Chagall marque les début boulevard Haussmann, puis sur le quai de Conti, avec une interruption pendant la Seconde Guerre mondiale. Avant 1940, outre Chagall, Katia Granoff exposait Pierre Bonnard, Chaïm Soutine et bien d’autres. Après la guerre, elle rencontre Michel Monet, fils de Claude, et découvre les Nymphéas, dont seul Georges Clemenceau, avant elle, avait décelé la modernité. Grâce à Katia et son ami Alfred Barr, conservateur au MoMA à New York, les plus grands musées du monde intègrent des œuvres de Monet dans leurs collections. 

Katia Granoff à Cannes devant une oeuvre de la série des Nymphéas
Katia Granoff à Cannes devant une oeuvre de la série des Nymphéas © DR

Après les décès de Rose en 1980 puis de Katia en 1989, Pierre Larock et ses fils, Pierre et Marc, tiennent respectivement les galeries de Honfleur et Paris. Pierre est en Normandie, Marc collabore avec son père à Paris. Il y eut des rencontres avec une nouvelle génération d’artistes, dont certains abstraits de la Nouvelle école de Paris (notamment Jean Messagier, Tal Coat, le dernier Hartung), mais aussi Simon Hantaï. Le livre rend hommage à Pierre, trop tôt disparu.

L’Anthologie de la poésie russe de Katia Larock-Granoff a été couronnée par l’Académie française. Mécène, elle a fait don d’un Claude Monet au musée d’Orsay et d’œuvres au musée Boudin à Honfleur. Les descendants perpétuent la tradition : un Soutine au Centre Pompidou, un Monet au musée de Caen, ou récemment un Vuillard au musée d’Orsay. Enfin, Édouard et Gabrielle Larock ont rejoint la galerie en 2018 avec une nouvelle génération d’artistes comme Gilles Bensimon ou Olivier Gourvil.

www.larock-granoff.fr 

L’univers Songye

Triple ouvrage sous coffret (250 euros), cet ensemble réunit dix-sept auteurs pour offrir un regard multifocal sur ce peuple d’Afrique centrale.  Ils montrent que l’expansion de la technologie du fer est à l’origine de la formation d’Etats puissants en Afrique orientale. Des chasseurs itinérants pénètrent le sud du bassin du Congo, se révèlent des forgerons qualifiés, fondent des chefferies puis des royaumes. Ce territoire devient le « pays des rois forgerons ». Avec les chefs-d’œuvre de l’art songye — statues, masques, ornements, accessoires, armes —, les auteurs étudient la relation nature-culture, terreau de leur créativité, les styles, la symbolique, le caractère sacré et les fonctions de ces objets de pouvoir ou de ces rituels et, enfin, leur influence sur l’art moderne et l’art contemporain, en particulier sur Jean-Michel Basquiat. 

Fonds Mercator propose aussi L’art nordique. Une philosophie de vie (65 euros), plongée dans les pays nordiques entre 1820 et 1920, mettant en lumière l’essence de leur art, notamment le lien avec la nature et la mythologie. Erich Heckel in Vlaanderen (60 euros) présente l’un des fondateurs du groupe Die Brücke à Dresde en 1905, devenu l’un des grands noms de l’expressionnisme allemand. Le livre se consacre à ses quatre années en Flandre, où il crée 75 peintures, des centaines de dessins et d’aquarelles et des gravures sur bois, référence du graphisme expressionniste en Allemagne et au-delà.

www.mercatorfonds.be 

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