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La santé doit changer : Tom Coolen, CEO de Helan, se livre sur les fondations d’un autre modèle de soins

Le système de santé en Flandre craque. Le vieillissement de la population s’accélère, les pénuries de personnel sont criantes et les coûts explosent. Pourtant, le système repose en grande partie sur d’anciens réflexes, selon Tom Coolen, directeur général adjoint de Helan Welzijnsgroep depuis 2024. À partir de septembre, il prendra seul la direction de l’une des plus grandes organisations à but social du pays, forte de plus de 6 500 employés et d’un million de clients.

Tom Coolen souhaite dans son nouveau rôle d’abord s’appuyer sur la solide fondation posée par le directeur sortant Rik Selleslaghs. « C’est vraiment à son crédit », dit-il. Cependant, en ce qui concerne le secteur de la santé au sens large, il veut amorcer un changement : une redéfinition profonde de l’organisation des soins et du bien-être en Flandre. Il souhaite ainsi collaborer avec d’autres acteurs pour aborder les soins et le bien-être différemment en Flandre.

Soin en panne

Aujourd’hui, tomber malade signifie rapidement se heurter à un système complexe, fragmenté et fatigué. Le citoyen ne sait pas toujours où se tourner. Les travailleurs, comme ceux des soins à domicile, des maisons de repos ou des hôpitaux, sont sous pression. Et les coûts continuent de grimper. « Nous dépensons actuellement 10,8 % du PIB pour la santé », explique Coolen. « En même temps, la Belgique investit à peine 3 % de ce budget dans la prévention. D’autres pays comme l’Allemagne sont au double. Et pourtant, nous savons que chaque euro investi en prévention est rentable à l’échelle macro. Pourquoi ne le faisons-nous pas ? »

La réponse, dit-il, réside dans la construction actuelle du système : « Un médecin est encore rémunéré par prestation. Heureusement, ce n’est pas ainsi que la santé est pensée, mais en réalité il n’y a pas d’incitation à rendre quelqu’un en meilleure santé. Au contraire. » Tom Coolen plaide pour une transition vers des soins basés sur la valeur, où les prestataires sont rémunérés en fonction des gains de santé obtenus. Il cite Singapour comme exemple inspirant. « Ils montrent que la prévention fonctionne quand elle est inscrite structurellement : les choix sains y sont récompensés, pas seulement promus. Les gens sont soutenus pour vivre plus consciemment, et cela paie. Le pays combine de meilleurs résultats de santé avec des coûts de soins inférieurs. Ce n’est pas une campagne, c’est un choix de système. »

Les trois grands défis

Pour organiser durablement les soins et le bien-être en 2030, Tom Coolen identifie trois grands défis. Le premier est l’accessibilité financière. « En Belgique, le système de santé n’est pas bon marché. Comment le rendre abordable pour tous ? Nous vivons tous plus longtemps, ce qui entraîne des coûts supplémentaires. Parallèlement, la population active se contracte en proportion. Plus de gens ont besoin de soins, alors que moins de personnes contribuent à la sécurité sociale. Et puis, il y a un demi-million de Belges en incapacité de travail depuis plus d’un an. Cela est socialement insoutenable. »

Le deuxième défi est la pénurie de personnel. « Les travailleurs sociaux font un travail incroyablement important, mais cela n’est pas toujours reflété dans leur rémunération ou leur reconnaissance. Aujourd’hui, un éducateur gagne moins qu’un chauffeur de bus. Cela n’est tout simplement pas acceptable. » Le troisième défi est la fragmentation du système. « Aujourd’hui, quiconque a besoin de soins entre dans un réseau complexe d’organisations. C’est aux acteurs comme Helan de simplifier et de connecter ce paysage pour le patient. »

Une histoire radicalement différente

Helan, qui est née en 2022 de la fusion de deux grandes caisses d’assurance maladie, est elle-même un produit de la vague de consolidation dans le secteur. « De plus de mille mutuelles en Belgique, n’en restent que 41. Mais la fragmentation reste une réalité. » Cependant, Tom Coolen n’est pas nécessairement contre la concurrence entre mutuelles. « Cette diversité stimule l’innovation et la concurrence. Nous sommes par exemple forts en prévention, d’autres dans d’autres domaines. Ce qui est crucial : nous devons collaborer en coulisse, par exemple via les services informatiques, afin que les fonds publics soient utilisés efficacement. »

« Nous voulons maintenant évoluer vers une organisation de bien-être, qui accompagne les individus à chaque étape de leur vie », déclare Coolen. Cela signifie aussi : travailler de manière proactive, en prenant en compte ce dont les gens ont besoin avant qu’ils ne tombent malades. « Le grand bouleversement nécessaire? Ne pas prendre les soins comme point de départ, mais le bien-être et la prévention : c’est là qu’un système sain commence. Pas seulement s’attaquer aux symptômes, mais à la cause. »

Tom Coolen

Leçons tirées du commerce de détail et de la technologie

Cette vision semble ambitieuse, mais Tom Coolen est pragmatique. Il regarde délibérément d’autres secteurs pour s’inspirer. « Nous devons repenser le bien-être comme nous avons repensé le commerce ou la mobilité. Regardez Bol.com ou Netflix : ils offrent des services facilement accessibles et personnalisés, qui donnent des conseils proactifs. C’est ce que les gens attendent aussi d’un système de santé aujourd’hui. »

Cette logique est déjà appliquée par Helan. Grâce à des communications basées sur les données, elle envoie des informations personnalisées à ses membres : informations sur la grossesse, conseils sur la ménopause, brochures pour les jeunes parents. « Nous voulons que les gens sentent que nous sommes présents aux moments importants, sans qu’ils aient à le chercher. »

La technologie est un élément clé de cette transformation. « Ce n’est pas un objectif en soi, mais un moyen de donner de l’autonomie aux personnes. Et de rendre les soins et le bien-être plus accessibles. » Helan investit massivement dans les applications numériques, comme les chatbots intelligents et les algorithmes de planification pour l’aide à domicile et la garde d’enfants. L’IA joue elle aussi un rôle de plus en plus important. « Nous utilisons l’IA pour prédire la sortie des clients, ou pour détecter les personnes à risque de perte d’autonomie. Cela nous permet d’agir plus rapidement et de manière plus ciblée. » En même temps, Tom Coolen met en garde contre des règles trop strictes sur l’utilisation des données. « Si les données servent véritablement l’intérêt du client, nous devons les gérer avec bon sens. Aujourd’hui, nous sommes parfois bloqués par des règles de confidentialité qui entravent au contraire le client. »

Culture pratique

Tom Coolen n’est pas le genre de CEO qui dirige uniquement depuis une tour d’ivoire. Sa conviction : on ne peut prendre de bonnes décisions qu’en comprenant aussi le travail de terrain. C’est pourquoi il a lui-même travaillé en tant qu’aide à domicile. « J’ai constaté combien ce travail est lourd, tant physiquement que mentalement. Les employés travaillent souvent seuls toute la journée et doivent gérer des situations difficiles ou des clients vulnérables.’

Cette pensée pratique, il veut l’ancrer durablement dans la culture d’Helan, qui compte 6 500 employés. « Nous sommes une organisation valorisée par ses principes, et je veux continuer à renforcer cela. Les employés font la différence. S’ils se sentent bien, nos clients le ressentent. »

Vers un nouveau système

Si Tom Coolen devait redessiner le système de santé demain, il regarderait au-delà des seuls soins. « Le bien-être concerne aussi l’environnement, l’éducation, le cadre de vie. Cela touche à tout. Et nous ne devons pas punir les gens, mais les récompenser pour des choix sains. Tout comme avec une conduite sécuritaire, on obtient une réduction sur son assurance auto. » Selon lui, la solution réside dans une nouvelle manière d’organiser et de financer. Ne plus rémunérer au volume, mais par résultat. Ne plus proposer des services fragmentés, mais une histoire de bien-être plus intégrée. Et surtout : remettre le citoyen au centre. « Si nous voulons que les gens vivent plus longtemps en bonne santé, qu’ils aient une meilleure qualité de vie et moins besoin de soins, nous devons oser intervenir maintenant. Et nous voulons être des pionniers dans cette démarche. »

Daphne Dorgelo
Daphne Dorgelo
Daphne Dorgelo (1996) travaille chaque semaine pour Forbes, où elle rédige des articles sur le style de vie luxueux, le leadership, l'innovation, les tendances et, bien sûr, les entrepreneurs belges inspirants. Sa passion pour le journalisme et les médias s'est manifestée dès son plus jeune âge. Après avoir obtenu une licence en information aux Pays-Bas, elle s'est installée dans la ville belge du diamant il y a six ans, après avoir obtenu un master en journalisme à la KU Leuven d'Anvers. Cela fait maintenant huit ans qu'elle écrit en tant que pigiste pour divers magazines, dont quatre ans pour des magazines de style de vie belges tels que L'OFFICIEL, Fifty & Me et ELLE.

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