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Éric Cortois (D’Ieteren Luxury Performance) : « Dans le luxe, mieux vaut avoir trop peu que trop »

Après une carrière de plus de 30 ans chez D’Ieteren, importateur historique des marques du groupe Volkswagen (Audi, Cupra, Seat, Skoda, Porsche, Volkswagen et Volkswagen Utilitaires), Éric Cortois occupe désormais la fonction de CEO de D’Ieteren Luxury Performance, la filiale de distribution des marques de luxe (Porsche, Bentley, Lamborghini, Bugatti Rimac et Maserati). Cette division est même devenue tout récemment distributeur exclusif de Maserati en Belgique. L’occasion de se plonger dans cette structure vraiment « à part ».

Qu’est-ce que D’Ieteren Luxury Performance, précisément ?
Il y a trois ans, Denis Gorteman, CEO de D’Ieteren, m’a chargé de concevoir un pôle dédié au luxe. Nous observions une croissance du marché des véhicules de luxe, contrairement à celui des marques généralistes, qui stagnait, surtout après la crise du Covid. À l’époque, nous gérions déjà six des neuf concessions Porsche en Belgique, ainsi que Bentley, Lamborghini et Bugatti. L’objectif était de réunir ces marques sous une même entité pour garantir un service d’excellence homogène à travers le pays. C’est ainsi qu’est né D’Ieteren Luxury Performance.

Concrètement, quelle est l’ampleur de cette structure aujourd’hui ?

Actuellement, D’Ieteren Luxury Performance regroupe 360 collaborateurs entièrement dédiés à une clientèle de luxe. Notre réseau en Belgique se compose de 7 concessions Porsche, 3 concessions Bentley, 2 concessions Lamborghini, 3 concessions Maserati ainsi que des concessions Bugatti et Rimac en Belgique et au Luxembourg. Chaque marque conserve son identité propre, avec des équipes spécialisées pour la vente et l’après-vente.

Comment Maserati s’est-elle intégrée à votre portefeuille ?
Dans notre stratégie d’expansion, nous recherchions des marques en phase avec notre ADN, mêlant luxe et performance. J’ai pris contact avec Maserati au moment où leur concessionnaire anversois, FMA (Ferrari Maserati Antwerpen), se retirait. Les discussions ont abouti à une collaboration. Plus récemment, ACG, qui gérait les concessions de Bruxelles et Gand, a également souhaité céder ses activités. L’usine Maserati nous a alors approchés. C’est comme cela que D’Ieteren est devenu distributeur exclusif du Trident. Avec ses 110 ans d’histoire ancrée dans la course automobile, son design distinctif et son identité unique, la marque italienne complète parfaitement notre portefeuille sans concurrencer nos autres marques. D’ailleurs, dans le luxe, les clients ne remplacent pas une voiture par une autre : ils enrichissent leur collection.

Une Bugatti sur la Grand Place © D’Ieteren Luxury Performance

Envisagez-vous d’autres projets d’expansion ?
Nous restons ouverts aux opportunités, mais aucune autre marque n’est dans notre viseur pour l’instant. Notre priorité est d’exceller dans ce que nous faisons déjà. Par exemple, nous avons repris Porsche Oost-Vlaanderen à Gand il y a un an. Vendre des voitures, c’est une chose, mais assurer un service après-vente irréprochable est tout aussi crucial. Avec la croissance du parc Porsche, nous avons investi dans l’agrandissement de nos infrastructures après-vente à Louvain-la-Neuve, Malines, Anvers et Liège. Nous recherchons également un nouveau site pour Maserati à Gand. Ces projets nécessitent des investissements conséquents.

Avec la distribution de Maserati, comptez-vous adopter une stratégie
agressive pour booster les ventes ?
Pas du tout. Dans le secteur du luxe, l’exclusivité prime : mieux vaut avoir trop peu que trop. La valeur de revente est un critère clé, ces véhicules représentant un investissement significatif. À titre d’exemple, Maserati écoule 14.000 voitures par an dans le monde, Lamborghini 10.700. En Belgique, Porsche représente environ 3.500 à 3.600 unités, et Bentley une centaine. Nous opérons dans des niches, et ces marques doivent le rester, même si elles enregistrent une croissance.

Des rumeurs circulent sur l’avenir incertain de Maserati, propriété du groupe
Stellantis. Avez-vous des garanties sur sa pérennité ?
Les garanties absolues n’existent pas. En tant qu’entrepreneurs, nous assumons des risques. Cela dit, nous avons une confiance mutuelle avec Maserati. Leur nouvelle direction sait parfaitement comment positionner la marque à son juste niveau, et nous partageons cette vision.

S’agit-il d’un contrat de distribution ou d’importation pour Maserati ?
Ce sont des contrats de retail, comme pour Lamborghini, Bentley et Bugatti. Nous travaillons directement avec l’usine, sans intermédiaire, ce qui est logique vu les volumes limités de ces marques.

© D’Ieteren Luxury Performance

Vous consolidez votre présence, mais Maserati n’a pas encore d’enseigne
dans le sud de la Belgique. Est-ce prévu ?
Nous voulons d’abord bien comprendre notre clientèle. Il existe déjà un parc Maserati dans le sud du pays, et nous étudierons les opportunités en temps voulu, sans précipitation. L’avantage de marques comme Maserati, c’est qu’elles ne nécessitent pas de concessions grandes comme des cathédrales pour délivrer un service de qualité. Pour l’instant, nous visons 160 unités annuelles pour nos trois concessions. Avec les nouveaux moteurs en développement, la marque va croître, mais toujours avec le service client comme priorité.

D’Ieteren Luxury Performance, c’est plus qu’un simple distributeur de
voitures, n’est-ce pas ?
Nous offrons une expérience globale. Nos clients partagent des passions comme l’art, la gastronomie ou le sport automobile. Nous organisons des événements pour les réunir. Nous avons des partenariats avec des lieux prestigieux, comme l’hôtel La
Réserve à Knokke (propriété de Marc Coucke, ndlr). Nous y disposons d’une « signature room » où les clients pourront découvrir régulièrement l’une de nos marques de luxe. Nous avons en effet constaté que beaucoup de nos clients se rendent dans cet hôtel. Nous avons tout récemment signé le même genre de partenariat avec l’hôtel Les Bains à Spa, non loin du circuit. Dans les deux cas, nos clients bénéficient d’un accueil exclusif, avec une coupe de champagne et des services sur mesure, comme des réductions sur les chambres, des vouchers ou une navette Bentley.

© D’Ieteren Luxury Performance

Vous êtes également actifs dans les classic cars ?

Absolument. Nos marques ont une riche histoire. Par exemple, 70 % des Porsche produites depuis 1950 roulent encore. Cela exige des mécaniciens spécialisés, capables de restaurer ces véhicules avec des pièces d’origine. Nous offrons ce service pour Porsche, Bentley, Lamborghini et Maserati, avec un savoir-faire d’exception.

Vous mentionnez peu Bugatti et Rimac.
Rimac, qui fait partie de Bugatti, est une niche extrêmement exclusive. La Rimac C_Two, une hypercar électrique de 2.000 chevaux, incarne la pointe de la technologie. Son créateur, Mate Rimac, développe aussi des batteries et des taxis autonomes à Zagreb. L’an dernier, nous avons livré six Bugatti, une année record, et trois Rimac à ce jour. Ces voitures, souvent commandées sur mesure directement à l’usine, s’adressent à des collectionneurs passionnés disposant déjà d’un grand parc.

Rimac © D’Ieteren Luxury Performance

Où voyez-vous D’Ieteren Luxury Performance dans 5 à 10 ans ?
Difficile à prévoir avec l’évolution des contextes fiscal et technologique. Mais je crois en la pérennité de la passion pour la conduite. Si les voitures du quotidien deviennent autonomes et partagées, les véhicules de luxe et de sport deviendront encore davantage des objets de plaisir, comme les chevaux le sont devenus aussi au fil du temps. Il faudra peut-être construire plus de circuits pour répondre à cette passion (rires).

 

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