Un concept horloger d’un nouveau genre s’apprête à ouvrir au Sablon. Ce projet un peu fou impulsé par Gilles Clavareau – qui a lancé L’Artisan du Temps il y a vingt ans -, pourrait contribuer à amorcer l’avènement du Sablon comme nouveau pôle horloger à Bruxelles.
Gilles Clavareau n’a que 16 ans lorsqu’il part en France pour apprendre le métier d’horloger. L’univers de la montre le passionne. Apprenti, il rêvait déjà de créer son propre magasin. Ambition qu’il réalise en 2014, en ouvrant L’Artisan du Temps, un espace dédié à l’achat, la vente et la réparation de montres et horloges anciennes ou récentes, tant qu’il s’agit d’un objet horloger de qualité, avec une préférence pour les montres-bracelets de collection. À l’époque, il réalise un modeste prêt de 5 000€, juste de quoi démarrer un petit business dans la chambre de sa maison familiale. La première année, son chiffre d’affaires est de 28 000 euros. En 2023, son entreprise spécialisée en horlogerie de collection réalisait 7 millions de chiffre d’affaire, avec 20% supplémentaire de CA chaque année depuis 2013.
Il faut dire que la valeur de ce marché a toujours au minimum suivi l’indexation du coût de la vie, mais il a bien plus souvent augmenté. « Qu’elle soit une pièce de baptême, de fiançailles, tool-watch, bling- bling, ou une marque de statut social, la dépense pour une montre est toujours perçue comme un investissement. Elle ne se jette pas, elle se répare et se revend toujours », explique le passionné. Aujourd’hui, Gilles Clavareau est toujours l’unique actionnaire et gérant de sa société qui a bien grandi. L’Artisan du Temps se compose désormais d’un magasin situé à la Bascule à Bruxelles, une vitrine de 12 mètres avec plus de 200 montres en stock, mais aussi d’un atelier de réparation juste en face. Huit membres travaillent aujourd’hui à plein temps, tant au comptoir qu’à l’établi.
Au cœur de l’atelier, on retrouve les montres issues des plus belles manufactures suisses : de Rolex à Omega en passant par Jaeger LeCoultre, Patek Philippe, Vacheron & Constantin, Audemars Piguet, Breguet, Longines, IWC, A.Lange & Söhne, Heuer ou encore Breitling. L’atelier a toujours été indépendant des marques, mais aujourd’hui il est agréé par Omega.
Éveline, le nouveau « concept horloger »
Néanmoins, Gilles Clavareau a toujours un goût de trop peu. Il y a ce fantasme enfoui en lui depuis des décennies qui n’attend qu’a prendre forme. Ce 6 juin 2024, après plus d’un an et demi de chantier, et 2,4 millions d’euros financés et investis, Éveline ouvrira ses portes rue des Minimes au Sablon. L’idée ? Un « concept horloger », c’est-à-dire un véritable univers horloger offrant une expérience immersive aux clients. Une sorte de speakeasy où l’on vend des montres bien sûr, mais où l’on retrouve aussi un bar, une table d’hôtes, des ateliers ouverts, une salle de conférence et même une bibliothèque horlogère.
« À l’ère d’Internet, les magasins physiques ont un avenir un peu sombre. Je voulais créer un endroit où l’on vend plus que des montres, mais de l’expérience au gens », confesse l’intéressé. L’espace de 190 mètres carrés sur deux niveaux a fait appel à près d’une trentaine d’artisans pour faire naître un univers un peu fou. La déco est imprégnée d’un ADN horloger omniprésent, avec, notamment, une pendule de trois mètres de diamètre, une table avec le même polissage que celui que l’on retrouve à l’intérieur des mécanismes des montres et du béton coulé avec des d’horlogeries incrustées. « Notre magasin arrivait à sa capacité maximum, ce qui représentait un chiffre d’affaires perdu chaque année. L’ouverture d’Éveline permettra de disperser l’accueil tout en améliorant la qualité du service. On vise un chiffre d’affaires de 50% supplémentaire, soit 3 à 4 millions, sur la nouvelle boutique, sans faire d’auto-concurrence ou diviser notre chiffre d’affaires actuel, car nous proposerons un service complètement différent »
Le Sablon, futur pôle des passionnés ?
Éveline vise aussi à attirer les collectionneurs internationaux, mais également à se positionner dans un quartier en passe de devenir « le nouveau pôle horloger bruxellois ». « Holemans, Leysen ou Dinh Van sont des maisons bien implantées au Sablon qui font de la belle joaillerie mais peu d’horlogerie. Dans les prochains mois, plusieurs boutiques typiquement horlogères s’apprêtent à s’installer, c’est un secret de polichinelle. Parmi elles : Ivan’s, Hall of Time ou encore la maison mère de Breitling. Le Sablon risque de devenir un passage obligé pour les passionnés de montres et les acheteurs étrangers, ça crée une ambiance horlogère parfaite ! Dans mes rêves les plus fous, deux collectionneurs qui ne se connaissent pas et se rencontrent dans une autre ville se racontent qu’ils ont visité Patek Philippe à Genève, Audemars Piguet au Brassus… puis Éveline au Sablon. »
